1830~1870
Siège royal (Lupona) : Cariatide

Clés de compréhension du document
A. Approches possibles du document dans le cadre d’un cours d’histoire
- Décoloniser le regard sur l’histoire et l’ « art africain ».
- La diversité des systèmes politiques et juridiques en Afrique avant la colonisation.
- Le rôle des femmes dans les sociétés patriarcales africaines : importance de la filiation maternelle dans la transmission du pouvoir.
- L’instrumentalisation d’objets rituels par les colonisateurs européens.
- Une réflexion sur la mémoire, les objets sacrés, et la relation au monde des esprits.
- Les effets du regard colonial sur les objets africains.
- Les circulations d’objets africains vers l’Europe (vers 1900) et les enjeux actuels liés aux collections ethnographiques, à la restitution et à la patrimonialisation.
B. Contextes du document
1. Le royaume Luba
Le royaume luba se développe à partir du XVIe siècle dans le sud-est de l’actuelle République démocratique du Congo. Structuré autour d’un pouvoir monarchique central, il repose sur une hiérarchie complexe de chefs et de dignitaires, avec des rituels d’investiture codifiés et une forte sacralisation du pouvoir. La transmission du pouvoir suit une logique matrilinéaire malgré un système politique dominé par les hommes. Les objets royaux comme les sièges (lupona) matérialisent l’autorité spirituelle et politique du chef.
2. La statuaire royale luba
Cet objet s’inscrit dans la tradition artistique luba, où les trônes et tabourets royaux sont sculptés en bois avec une grande finesse. Le style se caractérise par la présence de figures féminines, souvent des ancêtres, qui soutiennent le siège comme cariatides. Ces représentations valorisent la femme comme vectrice de légitimité dynastique. Le tabouret n’est pas un simple meuble : il est investi d’une puissance symbolique, considéré comme le réceptacle de l’esprit du chef. Attribué au Maître de Buli, sculpteur luba actif au XIXe siècle, cet objet témoigne aussi de la reconnaissance de styles individuels dans l’art africain ancien.
Pour aller plus loin sur les Luba :
C. Points d’attention
- Dimension symbolique du siège : il ne sert pas à s’asseoir au quotidien, mais à contenir l’esprit du chef. Les sièges des dirigeants sont des symboles importants de pouvoir et d’autorité. Chez les Luba, le rang et le titre s’expriment par une progression vers des formes de sièges de plus en plus prestigieuses, en commençant par de simples nattes tressées, puis des peaux d’animaux, des trônes en argile, et enfin des trônes en bois sculpté. Le siège participe à la sacralisation du pouvoir. Le tabouret est souvent gardé dans un village différent de son propriétaire, il est recouvert de draps et caché pour éviter qu’on ne le vole. Il n’est visible qu’à des occasion spéciales. Cela tranche ave la façon dont ils sont exposés aujourd’hui dans les musées occidentaux.
- Figure féminine : bien que le pouvoir soit masculin, la transmission par la lignée maternelle est fondamentale ; d’où la représentation d’une femme comme support du siège. Elle représente sans doute une ancêtre féminine. On perçoit des marques de scarifications sur son corps, signes de beauté dans la société luba.
- Circulation et collecte : le tabouret a quitté son contexte rituel vers 1900 pour rejoindre des collections européennes. Cela invite à une réflexion critique sur l’histoire des musées et des collections coloniales.
D. Biographies
E. Pour aller plus loin :
- Isidore Ndaywel, Histoire générale du Congo, Bruxelles, 1998.
- Isidore Ndaywel, Le système politique luba et lunda : émergence et expansion, dans Histoire générale de l’Afrique V : L’Afrique du XVIe au XVIIIe siècle, UNESCO, 1999.
- Royal Seat (Lupona): Female Caryatid sur https://www.metmuseum.org/art/collection/search/314034